La loi des sondages

Un article, paru en seconde page du journal "Detroit News Today" a remué le camp démocrate de la ville en révélant les détails d'un contrat passé, voila un peu moins de vingt ans, entre la municipalité et son fournisseur d'électricité.
L'accord garantissait à la municipalité des facilités dans le paiement de ses factures (échéances retardées, intérêts minorés ...) et la garantie que le centre-ville ne serait pas coupé en échange de l'instauration d'un forfait de plusieurs dollars, indexé sur l'inflation, pour tous les habitants de la ville utilisant l'électricité. Le scandale se situant également dans la possibilité pour l'entreprise de couper certains quartiers tout en comptabilisant des tarifs aux clients coupés; l'énergie ainsi économisée pouvant alors être revendue à d'autres clients ce qui lui permet ainsi de sauver ses marges et de ne pas être mise en danger par l'énorme dette de Détroit à son égard.

Profitant de l'aubaine créé par cette révélation, les candidats républicains ont dénoncé l'injustice sociale faite par les démocrates et criés à l'escroquerie et au vol. Chacun a promis de revenir sur un tel accord non sans rester prudemment dans le flou sur la nature des négociations et du nouvel accord qui en sortirait car enfin, Détroit a une dette de plusieurs centaines de millions de dollars envers la compagnie d'électricité et elle n'est pas en position de force pour négocier.
Anthony Gone prône évidemment de supprimer le "forfait de la dette" qui punit les consommateurs pour les erreurs de la ville. Il souhaite échelonner la dette sur plusieurs années et la financer en réalisant des coupes budgétaires drastiques, notamment sur les budgets culture et sport mais aussi sur le fonctionnement des services de la ville et par l'augmentation des tarifs des services non essentiels à la population. Le candidat a abordé la vente de plusieurs bâtiments de la ville mais sans trop s'étendre sur le sujet. Manoeuvre politicienne ou non, Gone a également souhaité sécuriser les approvisionnements en électricité pour les entreprises, seul pilier encore debout de l'économie malade de Détroit ...
Richard Lewis a également fustigé une municipalité démocrate qui sauve un quartier riche en faisant payer tous les autres. L'ancien procureur souhaite naturellement revenir sur un accord forcément impopulaire et remettre de l'ordre dans les finances et le fonctionnement des services de Détroit. Sa solution commence par vouloir transmettre les détails du contrats au service juridique pour envisager un recours en justice contre la compagnie qui jouirait d'un abus de droit permis par la municipalité; il souhaite également rééchelonner la dette et vendre plusieurs bâtiments de la ville pour payer les premières traites. Lewis veut également sanctuariser l'éclairage public (des rues comme des bâtiments publics) afin de se limiter au strict service du public et laisser chaque client régler ses factures auprès de son fournisseur mais sans la fameuse taxe forfaitaire.
Enfin, Lewis s'est également résigné à parler de nécessaires économies dans les services de la ville mais en écartant toute idée de diminuer encore la sécurité. Le candidat a également évoquer, du bout des lèvres, une probable augmentation des taxes à la population.

Du côté démocrate, le maire Robert Kellington a commencé par rejeter la faute de cet accord sur son prédécesseur mais, étant lui-même ancien adjoint, sa pauvre défense n'a pas empêche sa chute de popularité dans les sondages ... Il s'est donc lancé dans l'impossible défense de l'accord, mentionnant le poids sans égal du centre ville dans les recettes fiscales de Détroit et la nécessité pour la mairie de sécuriser ses rentrées fiscales pour mieux les répartir sur des services ouverts pour tous.
Bien obligé de repartir à l'offensive, le maire a exprimé sa volonté de renégocier l'accord pour faire cesser les coupures intempestives mais il ne peut envisager la chose que par une augmentation des taxes et quelques économies, à la marge. Le maire a mis en garde contre toute tentative de priver le centre ville d'électricité, ce qui ferait fuir les habitants de ce quartier et provoquerait, in fine, un affaissement des recettes fiscales de la ville.
Son opposant, Bill Yaxley, cherche à se démarquer du maire en dénonçant également l'accord qu'il annonce vouloir renégocier. Bill Yaxley souhaite faire cesser le forfait comme les coupures et augmenter les taxes en direction des plus riches et des entreprises pour une redistribution des richesses. Il souhaite également sauvegarder l'éclairage public pour assurer de meilleurs services pour tous. M. Yaxley souhaite instaurer une campagne de dons pour alléger les dettes de la ville et régler le problème de l'énergie à Détroit. Faisant l'éloge des énergies renouvelables, M. Yaxley projette de doter chaque bâtiment public de panneau photovoltaïque ainsi que, pour les tours, d'éoliennes qui produiront une énergie gratuite et renouvelable...

Difficile de dire qui va profiter de cette affaire mais certainement pas le maire qui a déjà perdu quatre points dans les intentions de vote. Son concurrent démocrate limite la casse avec une perte de deux points mais les deux républicains n'engrangent qu'un seul point de plus dans les intentions de vote. Serait-ce la défiance du politique qui profiterait de la polémique ?